Jean Motte
« En automne, prépare-toi ». D’accord, mais à quoi exactement ? Avant d’en parler, il est important de préciser deux points. Dans la pensée chinoise et particulièrement de l’acupuncture, il est important de connaître le début et la fin des saisons. Le printemps commence le 5 février et se termine le 5 mai. L’été débute donc le 6 mai et se termine le 5 août. L’automne commence le 6 août et se termine le 5 novembre. Enfin, l’hiver débute le 6 novembre et se termine le 5 février. L’équinoxe d’automne est le milieu de cette saison qui a commencé le 5 août et se terminera le 5 novembre.
Continuons avec le schéma classique des cinq éléments en posant ceux-ci comme cinq tiroirs de rangements. Il y a le tiroir bois, feu, terre, métal et eau. Ils contiennent des « outils » qui ont la même énergie vibratoire, la même fréquence. Donc tout ce qui est dans le tiroir métal, par exemple, permettra de nourrir ou d’apaiser les organes qui y correspondent, en l’occurrence le gros intestin et les poumons. De plus, chaque élément est en relation avec les autres par des lois qui permettent de réguler les excès et les insuffisances.
Que nous dit la sagesse ancienne de la médecine traditionnelle chinoise ? En premier lieu, que la maladie se déclenche chez celui qui n’obéit pas aux ordres du Tao. Le Tao signifie la voie. C’est celle qui est donnée, imposée par les saisons. Nous devons vivre leur rythme, afin d’être en harmonie avec chacune d’entre elles.
En automne, il faut se lever tôt et se coucher tôt, en même temps que le soleil. Ici, nous touchons un point fondamental : la lumière. L’acupuncture repose sur des piliers dont l’un est la lumière. Cette énergie nommée qi (souffle) correspond à la lumière. Il paraît surprenant de nommer la lumière par le terme de souffle, mais il faut se replonger il y a trois mille ans. Ce que les Chinois ont remarqué en méditant, c’est que l’air que nous respirons est en fait de la lumière transformée par la végétation. C’est à partir de cet air que nos poumons se chargent d’oxygéner le sang.
La nature de l’automne consiste à se faner, à s’assécher, à tomber. Les feuilles se coupent de l’arbre ou de la tige. Les hommes récoltent les épis, les fruits et les grains. C’est le moment de la dessiccation, le fait de perdre de l’eau et de faner. Les Chinois appellent cette phase « le mouvement du métal ». Nous devons obéir à cette force de libération puisqu’il nous faut nous nettoyer, en faisant un jeûne ou en mangeant nettement moins. Il ne faut plus apporter de travail à la maison, rentrer plus tôt chez soi, calmer l’agitation en sortant de moins en moins. Il ne faut plus faire de sport le soir, ni aller au spectacle ni faire de grands repas. C’est le temps de la préparation à la disette hivernale et donc le moment de s’alléger l’esprit et le corps. La force agissante est de plus en plus centripète, c’est-à-dire qu’elle se tourne vers l’interne. C’est pour cela qu’il est important de rentrer chez soi, de calmer ses envies et ses désirs.
Nous pouvons facilement aider ce moment par un nettoyage simple, efficace et sans risque en suivant quelques règles :
En second lieu, la sagesse ancienne nous dit que celui qui n’a pas obéi aux ordres du printemps sera malade en automne. Nous sommes maîtres de notre santé. Elle nous appartient. Notre comportement au printemps influence l’automne et inversement. Et ceci est juste aussi dans l’axe des solstices. L’été influe sur l’hiver et vice versa.
Qu’avons-nous vécu au printemps ? Un confinement qui est une force centripète, une énergie automnale qui s’oppose à celle du printemps. Celle-ci doit être centrifuge, vers l’extérieur, pleine de puissance de vie. Et nous n’avons eu que des informations mortifères et contradictoires. Si j’insiste sur ces derniers mots, c’est qu’ils lèsent « le mouvement bois printemps ». En effet, la mort appartient au métal, l’énergie de dessiccation et de séparation. Cela s’oppose diamétralement au mouvement du bois.
Quant au mot contradictoire, il signifie absence de choix. Et un organe est essentiel à notre choix, la vésicule biliaire, qui appartient à l’élément bois. Donc notre printemps a été malmené et nous en subissons les conséquences en automne.
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L’homme est, d’après les textes traditionnels, couvert par le ciel et porté par la terre. Il y a donc à décrire le principe métal, dans les trois strates, céleste, terrestre et humaine.
En automne, rappelez-vous qu’il faut mourir, sécher, couper, se déraciner. Tous ces mots expriment la perte. Et là est la cause du chagrin qui sera entretenu par le poumon. L’émotion produite par un poumon en vide d’énergie est le chagrin, à ne pas confondre avec la tristesse. La tristesse prend sa racine dans la joie. Le chagrin est attaché à la perte.
L’acupuncture traditionnelle considère qu’il n’y a pas de maladie psychosomatique, mais bien somatopsychique. Les émotions prennent naissance au sein des organes lorsque ceux-ci sont affaiblis. C’est pourquoi il est recommandé de se maintenir en bonne santé, en amont afin de ne pas succomber à nos émotions. Celles-ci doivent passer comme les nuages dans le ciel. Elles viennent, sont reçues, puis disparaissent. Mais parfois aussi elles s’incrustent, persistent, parasitent.
Le poumon est un trésor, car il renferme en son sein, une entité nommée Po. Celle-ci est considérée comme étant ce qui nous accroche à la vie. Suicides, mutilations, violences sur soi ou sur autrui sont des expressions du Po en souffrance.
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Le gros intestin, lui, prend son départ à l’index et monte le long du bras pour ensuite s’écouler sur le cou et passer au-dessus des lèvres supérieures et terminer sur le côté du nez. Il participe ainsi à la fonction de l’odorat, car le dernier point du gros intestin se nomme « accueil des parfums », ce qui est joliment significatif.
En outre, il n’est pas anodin qu’intestin soit utilisé comme adjectif dans l’expression, « guerres intestines ». Il faut comprendre que des querelles qui perdurent auront une action nuisible sur les intestins qui pourront s’exprimer par des ulcérations plus ou moins profondes. Remarquez aussi que le mot ulcération vient d’ulcérer qui est l’expression aussi de la colère. Le gros intestin n’est jamais à l’origine de la colère. Il n’est que l’expression de cette émotion qui ne peut s’évacuer.
Le gros intestin est le maître de l’énergie de défense. C’est grâce à lui que nous pouvons nous promener sans risque d’attraper des virus ou autres petits intrus, car les intestins nous protègent. Pour autant, il faut qu’ils soient en pleine possession de leur énergie. Ils doivent avant tout fonctionner correctement.
L’automne nous vient du latin vertumnus qui signifie « qui se tourne » car le soleil change, la saison impose un autre mouvement que celui du printemps et de l’été. Ce retournement est important à comprendre dans sa symbolique. Il y a quelques points d’acupuncture qui comportent le sens de retournement, mais seuls deux points nous font saisir le sens imposé par la nature. Il y a le 14 Rte (quatorzième point du méridien de la rate) qui se trouve sur le ventre un peu en dessous du nombril et sur le côté dont la traduction est « noeud du ventre ».
Il y a aussi le 16 Rte qui retrouve, lui, à trois distances au-dessus du nombril et sur le côté. Son nom est « plainte du ventre ». Ils agissent donc sur le gros intestin que cela soit par des torsions (nœuds) ou par des bruits (les plaintes sont des borborygmes). Ces deux points, à eux seuls, ont une action sur le ventre d’une personne qui n’a pas encore exprimé oralement ce qu’elle devrait dire, qu’elle garde en elle. Mais le ventre est là qui « parle ». Il crie même le devoir d’exprimer afin de se libérer certains soucis qui nous pèsent.
Vous devez sûrement connaître la cure Urval qui nous permet de nous purifier. Elle consiste à ne consommer que du raisin tout au long de la journée, en cinq ou six prises fractionnées. La quantité à prévoir est de 1 à 2 kilos ou davantage par jour, en alternant le raisin blanc et noir. Il faut boire de l’eau. C’est simple et il faut tenir minimum trois jours. Le mieux étant cinq jours. Ce n’est pas pour rien que le raisin est là, pour nous aider dans notre allégement corporel afin de mieux s’élever spirituellement. C’est l’enfant de l’eau et du feu !
Observez la nature et obéissez-lui, c’est la clef de l’éternelle santé. Dans la pensée chinoise, cela ne signifie nullement vivre éternellement, mais bien vivre l’instant présent en bonne santé. Et le présent étant un synonyme de cadeau, vous fêtez cela tous les jours !