Nihel Amarni
Cette nouvelle étude menée par ces mêmes scientifiques (en collaboration avec le CHU de Toulouse et l’université de Picardie), alerte sur la capacité avérée du dioxyde de titane à traverser le placenta et à atteindre l’environnement fœtal.
L’analyse se base, cette fois-ci, non plus sur des rats, mais sur des essais effectués à partir d’organes et tissus humains (étude ex-vivo). Les chercheurs ont analysé 22 placentas de mères volontaires, d’une part en dosant la présence de dioxyde de titane accumulé dans cet organe lors de la grossesse, et d’autre part en testant son possible passage vers le foœtus. Conclusion : ces nanoparticules de métal sont bien présentes dans le placenta pendant la grossesse, et peuvent contaminer le compartiment fœtal. À l’appui de leur démonstration, l’analyse d’échantillons de selles de 18 nouveau-nés – pris au hasard – montre que la moitié d’entre eux contenaient des doses substantielles de dioxyde de titane.
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Les risques encourus pour les bébés à naître n’ont pas encore été clairement établis, comme le rappelle le professeur Éric Houdeau, un des auteurs des études de l’Inrae préalablement citées. Et de préciser : « de précédentes analyses sur les rats ont montré que le dioxyde de titane, à forte dose, pourrait avoir des impacts sur le développement fœtal, notamment cérébral ». Il est donc important que des études complémentaires soient faites afin de connaître les potentiels risques chez l'humain.
Outre sa présence dans l’agroalimentaire dénoncée depuis longtemps, le E171 est également utilisé aujourd'hui dans les cosmétiques, la peinture murale ou encore dans des produits d’hygiène comme le dentifrice. Bien que le dioxyde de titane ait été temporairement interdit sur le marché alimentaire, ce n’est pas le cas pour les autres filières. Or, le Pr Éric Houdeau spécifie que « même si l’étude porte particulièrement sur l'absorption du dioxyde de titane par voie orale, les nanoparticules peuvent également être absorbées par les sujets par voie cutanée (crème, maquillage), et par voie respiratoire (peinture, poussière de carrelage…) ». Pour le cas plus spécifique du dentifrice il précise que « des études au niveau de l'épithélium de la bouche ont aussi été menées, l’utilisation de dentifrice contenant de l’E171 ou du CI77891 (en code cosmétologique) représente donc un risque d’ingestion flagrant ».
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Le rapport de l’Anses, paru en juin dernier, a également relevé la présence de nanoparticules de dioxyde de titane dans le lait infantile, les aliments à destination des bébés, mais aussi certains médicaments afin d’en améliorer l’aspect ou la texture. Alors que les données scientifiques s’accumulent, les réformes réglementaires et les interdictions restent aux mains du politique. À charge donc pour le gouvernement de prendre les mesures qui semblent s’imposer.