Clara Delpas
On ne naît pas avec un microbiote intestinal, on l’acquiert au cours des premiers mois de sa vie, par l’alimentation, mais aussi par le contact avec les nombreux microbes que l’on rencontre dans son environnement. Or, naître en plein confinement lié au Covid pourrait bien avoir perturbé cette acquisition. C’est ce qu’explique un récent article de Nature, qui présente les différentes recherches menées sur le microbiote intestinal des bébés nés pendant les mesures de confinement mises en place pendant la pandémie.
Tout d’abord, une étude menée par l’université de New York, durant les neuf premiers mois de la pandémie, auprès de vingt nouveau-nés a montré que ces derniers présentaient une moindre diversité microbienne que ceux nés avant les mesures de confinement. Ce qui suggère que les mesures de confinement, en limitant les contacts de ces nouveau-nés avec les nombreuses bactéries présentes dans l’environnement, ont perturbé la formation de leur microbiote intestinal.
Une autre étude, irlandaise, a analysé plus précisément les populations microbiennes intestinales de bébés nés à Dublin, pendant le confinement. Cette étude constate qu’à l’âge de 12 mois ces enfants ont un microbiote plus riche en bifidobactéries que les autres, ce que les auteurs expliquent par le fait que, confinement oblige, ils étaient plus susceptibles d’être allaités et risquaient moins de contracter une infection nécessitant un traitement par antibiotiques (grands destructeurs des bifidobactéries). En revanche, leur microbiote contient moins de bactéries de type Clostridia. Là encore, c’est logique : ces bactéries s’acquièrent notamment dans les squares publics, les magasins, les crèches et autres lieux où les enfants sont en contact les uns avec les autres !
Mais l’équipe irlandaise a observé chez ces enfants une plus forte prévalence des allergies ou de l’eczéma… Et, plus globalement, compte tenu des liens probables qui existent entre l’intestin et le cerveau (bien que peu d’articles de la littérature scientifique établissent ce lien avec certitude), des chercheurs soupçonnent ces déséquilibres de pouvoir influer le développement cognitif. L’article de Nature cite, à l’appui de cette idée, une autre étude d’observation qui a révélé une plus grande fréquence des troubles de la communication chez les nourrissons nés pendant la pandémie (bien que l'origine de ces troubles puisse être liée à d'autres spécificités du confinement).
Si l’article insiste bien sur le fait que la petite taille des échantillons étudiés limite la généralisation des résultats, il rapporte aussi les propos des chercheurs, désireux désormais d’étudier plus particulièrement le développement cognitif des nourrissons nés pendant le confinement. Affaire à suivre…