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Victimes des vaccins mal indemnisées : la justice s'en mêle

Sabrina Debusquat

L’Oniam – l’organisme chargé en France de l’indemnisation des victimes d’accidents médicaux – sera-t-il réellement en mesure d’indemniser les victimes des vaccins Covid ? Le Canard enchaîné du 10 avril dernier nous apprenait que les victimes de précédents vaccins ont dû lutter contre l’organisme pour arracher de dérisoires indemnisations. Accusé en 2017 par la Cour des comptes d’agir comme "un assureur qui s’attacherait à limiter sa charge du sinistre", l’Oniam a en effet proposé un peu plus de 162  000 € à une jeune femme de 26 ans qui souffre de narcolepsie (ce qui revient à s’endormir sans prévenir, brutalement, en cours de journée) depuis une vaccination de Pandemrix effectuée il y a quinze ans contre le virus de la grippe A (H1N1). Une indemnité jugée "manifestement insuffisante" par le tribunal administratif de Rennes, qui a estimé que la jeune femme en méritait au moins le quintuple, soit 814 000 €.

La responsabilité des pouvoirs publics dans l'ampleur des effets indésirables générés par ce vaccin est clairement engagée, comme l’a démontré une enquête de 2018 du British Medical Journal dont nous nous faisions l'écho. Autorisé dans la précipitation et sur la base de données insuffisantes, ce vaccin reçu par 4 millions de français a généré cinq fois plus d’effets indésirables qu’un vaccin équivalent, sans adjuvant celui-ci, l’Arepanrix. Entre 2011 et 2022, l’Oniam aurait reçu au moins 173 dossiers de demandes d’indemnisation au titre d’une vaccination H1N1, dont 105 de narcolepsie. Environ un tiers des plaignants aurait été indemnisés à des degrés divers selon une enquête de Libération.

Rappelons que la France avait accepté en 2011 le désengagement de responsabilité juridique des laboratoires GSK en échange d'une commercialisation accélérée. Il semble donc anormal que l’ONIAM rechigne aujourd’hui à indemniser correctement les victimes qui doivent en passer par de longues procédures et la case justice. Car ce n'est pas la première fois que l'organisme se fait taper sur les doigts par les tribunaux : en 2020 déjà, le tribunal administratif de Rennes avait condamné l’organisme à verser environ 700 000 euros à une femme de 24 ans souffrant de narcolepsie après sa vaccination au Pandemrix à l’âge de treize ans.

Concernant les vaccins anti Covid – rendus obligatoires par les autorités –, les demandes d’indemnisation de patients affluent depuis la pandémie. Or, les laboratoires ayant été là aussi désengagés de leur responsabilité par choix politique, on peut se demander si l’Oniam a les moyens de répondre à l’arrivée massive de demandes. L’organisme semblait si débordé il y a quelques temps qu’il n’a pas pu répondre aux questions de l’une de nos journalistes qui l’a contacté durant une enquête sur le sujet de la pharmacovigilance des vaccins Covid.

Dans son rapport d’activité 2022 publié en octobre 2023, l’Oniam expliquait qu’il avait reçu près de 590 demandes d’indemnisation, et rappelait que seuls 35 % des dossiers avaient obtenu une réponse positive lors des commissions de conciliation et d’indemnisation (CCI), le tout avec des délais de traitement des dossiers "maintenus à dix mois" en raison, notamment, des "difficultés rencontrées dans les travaux d’expertise médicale" et de "l’impact du report du traitement de demandes reçues pendant la période épidémique".

À deux reprises, en octobre 2021 puis en novembre 2023, des députés de plusieurs bords politiques ont tiré la sonnette d’alarme en proposant des amendements visant à renforcer les moyens financiers de l’organisme, mais ces derniers ont systématiquement été rejetés. Au moment de la dernière demande, les députés rappelaient les cas de victimes qui décèdent avant de voir leur demande aboutir et se scandalisaient de voir le " premier coupable de cette situation, le laboratoire Sanofi, se déleste[r] de toute responsabilité " et continuer à " faire état de dividendes records " pendant que c’est " l’argent public qui continue d’indemniser les victimes "…

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