Accueil Polémiques Pilule contraceptive : des risques dépressifs plus élevés de 130 %
Pilule contraceptive : des risques dépressifs plus élevés de 130 %
Une nouvelle étude montre que les femmes qui prennent la pilule contrapeptive ont bien un risque augmenté de présenter des symptômes dépressifs, sans que l’on sache encore bien pourquoi. Mais les moins de 20 ans, et les femmes plus âgées qui commencent tout juste à prendre un contraceptif oral, doivent en être informées... et surveiller leur humeur.
On suspecte depuis longtemps la pilule contraceptive d’agir sur le fonctionnement de notre cerveau. Augmente-t-elle le risque de dépression ? Depuis 20 ans, les chercheurs tentent de répondre à cette question, et les études sont parfois contradictoires : plusieurs ont montré un lien entre la prise d’une contraception orale pendant l’adolescence et un risque accru de dépression, voire de suicide, tandis que, chez les adultes, d’autres études suggèrent au contraire l’absence d’augmentation du risque, voire sa diminution.
Une nouvelle étude, menée par des chercheurs suédois, danois et australiens, s’est penchée sur les données de la Biobank britannique pour les 264 557 femmes dont le statut contraceptif était connu. Dans cette cohorte, 205 860 femmes ont déclaré avoir pris une contraception orale, tandis que 49 645 n’en avaient jamais pris. Dans le premier groupe, 20 454 ont déclaré une dépression (soient 9,94 %) ; dans le second, 4 926 (soient 8,65 %). Mais il faut noter qu’il s’agissait là d’une dépression au sens clinique du terme, ayant fait l’objet d’un diagnostic médical.
Un risque accru de dépression
Or, comme le soulignent les chercheurs, les symptômes dépressifs n’attirent pas toujours l’attention des cliniciens... C’est donc en étudiant une sous-cohorte de 82 232 femmes qui avaient répondu en ligne à un questionnaire sur la santé mentale qu’ils ont pu affiner leur analyse. Parmi elles, 44 605 déclaraient avoir ressenti au moins un des principaux symptômes de la dépression.
En recoupant les données, les chercheurs ont pu établir que les symptômes dépressifs étaient plus rapportés chez les femmes qui prenaient ou avaient pris un contraceptif oral que chez celles qui n’en avaient jamais pris. Celles qui avaient commencé à prendre la pilule avant ou à l’âge de 20 ans présentaient même un risque de 130 % plus élevé, et ce tout au long de leur vie, même si elles avaient arrêté de prendre la pilule depuis longtemps. Ils ont également observé que les femmes qui avaient commencé à prendre la pilule après l’âge de 20 ans avaient aussi un risque accru (de 92 %) de connaître des symptômes dépressifs, mais seulement au cours des deux premières années après le début du traitement...
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Des biais qui ont conduit à une sous-estimation ?
Les chercheurs soulignent qu’il a fallu compter avec plusieurs biais dans cette étude : le « biais du volontaire sain » selon lequel lorsqu’on prend un médicament et qu’il ne nous réussit pas, on l’arrête... Un biais que l'on retrouve de manière quasi-systématique dans les études sur le sujet. Ce qui fait que ne sont prises en compte dans la cohorte que les femmes qui ont continué de prendre la pilule parce qu’elles la supportaient bien. Les auteurs évoquent les biais spécifiques de la "Biobank britannique", à savoir, le fait que la population sélectionnée est en meilleure santé que la population générale du Royaume Uni [et donc que les résultats ne sont pas généralisables] ; le fait que les Européens blancs y sont surreprésentés ; le fait qu’il n’y a pas d’informations sur le type de contraceptif utilisé ; le fait qu’il n’y ait pas mention des éventuelles interruptions dans la prise de contraceptif.
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Les chercheurs concluent que la prise de contraception orale est associée à une augmentation du risque de dépression chez les adolescentes (un risque qui perdure tout au long de leur vie) et chez les adultes (risque qui apparaît surtout dans les premiers temps du traitement et disparaît à l’arrêt).
Tout en rappelant que de nombreuses femmes vivent aussi très bien le fait d’être sous pilule, les chercheurs invitent toutes les femmes à être informées de ce risque, et ainsi à surveiller l’apparition d’éventuels symptômes dépressifs. Ils en appellent à d’autres recherches pour élucider comment la contraception orale peut précipiter une dépression.
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Références bibliographiques
"Population-based cohort study of oral contraceptive use and risk of depression", Epidemiology and Psychiatric Sciences, mai 2023.
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