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Des super-probiotiques à l’épreuve du COVID

  • L'interaction bactéries-virus, importante dans l'infection CovidL'interaction bactéries-virus, importante dans l'infection Covid
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Loin de la tempête médiatique, la recherche sur les bactéries à effet thérapeutique a commencé dès le début de la pandémie et se poursuit. Elle confirme l’utilité de ces bactéries en tant que traitement adjuvant des pneumonies, dont celles associées au Covid-19. Et soulignent à nouveau l’importance de l’axe intestin-poumon dans le contrôle du Covid.

L’une des études récemment publiées ressort clairement du paysage. Un essai comparatif randomisé, conduit en Italie sur 70 patients atteints du Covid-19, a montré des résultats extrêmement encourageants. (1) Les patients recrutés étaient au stade de pneumonie sévère nécessitant une oxygénothérapie non-invasive, avec une imagerie montrant des poumons touchés à plus de 50 %. L’âge moyen est de 59 ans. L’essai s’est déroulé entre le 7 mars et le 4 avril, période où l’épidémie était au plus fort sous nos latitudes.

Le premier groupe était traité avec de l’hydroxychloroquine, antipaludéen qu’on ne présente plus, de l’azithromycine (bactériostatique) et du tocilizumab, un inhibiteur du récepteur de l’interleukine-6 utilisé pour lutter contre l’orage de cytokines. Le second groupe recevait, en plus de ce même traitement, un complexe de bactéries probiotiques à ultra-haute concentration, à savoir 2 400 milliards d’unités réparties en trois prises quotidiennes de 800. Nous sommes ici dans un usage thérapeutique, loin des probiotiques grand public, même si cette nouvelle génération ultra-dosée et plus ciblée a vocation à se démocratiser. Les souches utilisées étaient Streptococcus thermophilus DSM 32345, L. acidophilus DSM 32241, L. helveticus DSM 32242, L. paracasei DSM 32243, L. plantarum DSM 32244, B. lactis DSM 32246, B. lactis DSM 32247 et L. brevis DSM 27961.

Il en ressort que cette prise de probiotiques raccourcit fortement le délai d’amélioration. Une nette majorité des patients du second groupe a montré, en moins de 72 heures, une rémission des symptômes tels que fièvre, dyspnée, toux, migraine, asthénie, douleurs musculaires et diarrhées. Les diarrhées disparaissaient chez la plupart des sujets au bout de 3 jours, dont presque la moitié au bout de 24 h. Après 7 jours de traitement, le risque calculé d’évolution vers une détresse respiratoire avec intubation était 8 fois moindre comparé au premier groupe. Aucun des patients du second groupe n’est décédé. Aucun effet indésirable n’a été rapporté. Les données de cette étude indépendante devront être confirmées par des essais plus approfondis.

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Les mécanismes microbiens livrent peu à peu leurs secrets

Quelles explications à ces résultats ? La dernière souche du complexe, Lactobacillus brevis, était majoritaire dans la composition. Elle fait partie des souches pressenties au tout début de la pandémie, sur la base de la littérature connue, pour servir de traitement adjuvant face au Covid.(2) En 2014, des travaux démontraient que la prise de L. brevis réduit l’incidence de l’infection grippale chez les enfants d’âge scolaire et ce sans effet indésirable.(3) Une souche déjà connue pour son activité anti-inflammatoire et immunomodulatrice, aussi bien en prophylaxie qu’au cours d’une infection.(4) Car c’est bien l’équilibre de la réponse immunitaire qui oriente vers une évolution favorable ou non, et celui-ci semble indissociable du microbiote. Préalablement, le séquençage du microbiote des personnes décédées du Covid avait montré une diminution significative des bactéries symbiotiques lactobacilles et bifidobactéries indispensables au système immunitaire. Certaines parmi elles ont un rôle protecteur contre les infections virales y compris respiratoires.

Des virus sont aussi de la partie, le fameux virobiote, petit dernier dans l’étude de l’univers microbien. Différents mécanismes révèlent que les populations bactériennes que nous hébergeons sont régulées par des virus. Mais réciproquement, des infections virales peuvent être stoppées ou stimulées en fonction des bactéries présentes. Certaines infections sont capables de bouleverser durablement la relation entre bactéries et virus. Ce qui peut déboucher sur un cercle vicieux, une dysbiose bactérienne accentuant la gravité des infections virales.(5)

Un axe intestin-poumon qui se précise

Les preuves s’accumulent sur l’interaction entre les différents microbiotes. La découverte du dialogue entre microbiote intestinal et microbiote pulmonaire est récente. Ce dialogue bidirectionnel se fait d’ailleurs pour le meilleur comme pour le pire, c’est-à-dire qu’il est toujours constaté, que la réponse immunitaire soit normale ou vicieuse. Un dialogue entretenu aussi bien par les bactéries commensales que par les cellules de l’immunité.(6) Une inflammation dans le poumon peut induire, via la circulation dans le sang de métabolites microbiens, des changements dans l’intestin. Et réciproquement.(7)

Plusieurs travaux montrent qu’une souche courante telle que L. Rhamnosus GG renforce les barrières intestinale et pulmonaire, réduit l’inflammation induite par les lipopolysaccharides bactériens, stimule les lymphocytes T-Reg (les casques bleus de l’immunité) et diminue les cytokines pro-inflammatoires, y compris dans les infections respiratoires. Certaines souches probiotiques sont connues depuis plusieurs années pour intervenir dans la régulation de la réponse immunitaire, notamment sur l’équilibre entre cytokines pro-inflammatoires et anti-inflammatoires. Un équilibre aussi fragile qu’important, puisqu’il s’agit là du point de bascule entre une évolution favorable ou défavorable du Covid. Cette capacité est attribuée aux molécules de surface des bactéries qui servent de signalisation et communiquent avec les cellules des muqueuses. Un autre effet important exercé par les probiotiques est le maintien de l’intégrité de la muqueuse intestinale, voie d’entrée courante du SRAS-COV-2 qui se trouve ainsi réduite.(8) L’implication de l’écosystème intestinal avait déjà été évoquée pour expliquer la variation de la charge virale d’un test à l’autre chez la même personne.

Probiotiques : par les voies respiratoires aussi ?

Malgré toute l’importance du lien entre les microbiotes de l’intestin et du poumon, pourquoi ne pas agir directement sur celui du poumon ? S’il n’est pas possible de l’atteindre directement, un spray nasal est une possibilité sérieusement envisagée, en complément des probiotiques par voie orale. On trouve encore des lactobacilles symbiotiques dans les voies respiratoires supérieures. Certaines souches y sont présentes en plus grande quantité chez les personnes en bonne santé, par rapport aux personnes sujettes aux rhinopharyngites à répétition.

Des recherches plus poussées sur des personnes en bonne santé ont permis d’isoler des souches capables de bloquer la croissance et la virulence de plusieurs agents pathogènes. « Nos travaux sur d’autres virus montrent que certains lactobacilles peuvent bloquer l’attachement des particules virales aux cellules humaines » déclare le Pr. Sarah Lebeer, chercheuse en sciences biomédicales à l’université d’Antwerp en Belgique.(9) Des souches spécifiques de lactobacilles dans le nasopharynx et l’oropharynx pourraient aider à améliorer les défenses contre le virus inhalé. D’une part en améliorant la fonction barrière des muqueuses respiratoires, d’autre part via une action anti-inflammatoire, ce qui réduit le risque d’infections bactériennes secondaires au Covid-19.

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  1. https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fmed.2020.00389/full

  2. https://www.alternativesante.fr/coronavirus/covid-19-la-piste-du-microbiote-vers-un-nouveau-paradigme

  3. https://sfamjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/lam.12340

  4. https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1756464614004241

  5. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31333675/

  6. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29075294/

  7. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7052046/

  8. https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/09637486.2020.1807475

  9. https://isappscience.org/how-some-probiotic-and-prebiotic-scientists-are-working-to-address-covid-19/

 

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