Accueil Covid-19 Le cytomégalovirus (CMV) aggrave-t-il le Covid-19 ?
Le cytomégalovirus (CMV) aggrave-t-il le Covid-19 ?
Y a-t-il un lien entre la sévérité des symptômes du Covid-19 et l'infection préalable au cytomégalovirus (CMV), un virus très répandu mais encore mal compris. Certains scientifiques mettent en avant cette hypothèse, qui expliquerait certaines « bizarreries » du Covid-19, et appellent à plus de recherches sur le sujet.
Alors que l’épidémie de coronavirus semble en voie d’achèvement, il reste beaucoup à comprendre, notamment du côté des symptômes nombreux et variés observés chez les sujets âgés . Ces derniers ont constitué l’immense majorité des malades, et plus encore des décès entraînés par le coronavirus, avec cette particularité qu’ils étaient presque tous déjà fragilisés par une ou plusieurs pathologies antérieures, principalement des troubles cardiovasculaires et métaboliques.
Que vient faire le cytomégalovirus dans l’épidémie de Covid-19 ?
L’infection au cytomégalovirus, un herpès-virus persistant, est justement connue pour être associée à un certain nombre de troubles cardiovasculaires et métaboliques, mais aussi pour précipiter la sénescence du système immunitaire . L’infection primaire au cytomégalovirus ‒ comme pour les autres herpès-virus – est le plus souvent asymptomatique ou assortie de symptômes qu’on peut facilement confondre avec un refroidissement ou une grippe anodine. Mais sa présence perdure à l’état latent toute la vie durant, induisant selon les cas un état inflammatoire à bas bruit et mobilisant partiellement le système immunitaire pour une « surveillance rapprochée » permanente. Considérant que plus de 4 milliards de personnes sont porteuses du CMV et que sa prévalence augmente avec l’âge, la question s’impose presque naturellement : y aurait-il une interaction entre ces deux virus ? Le cytomégalovirus pourrait-il favoriser une infection au SRAS-CoV-2 aggravée ?
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CMV / SARS-CoV-2 : des parallèles troublants
Une étude publiée fin mai s’essaie à expliquer cette hypothèse. D’abord, le CMV se retrouve de façon préférentielle dans un certain nombre de tissus, dont les cellules de la lignée myéloïde (issues de la moelle épinière et qui évolueront en globules rouges, plaquettes et globules blancs, notamment), l’endothélium vasculaire et le tissu rénal. On trouve des proportions particulièrement élevées de personnes infectées par le cytomégalovirus chez les populations ayant connu le plus de mortalité au Covid-19, comme en Italie du Nord, en Chine et en Espagne. De plus, les taux des infections au CMV sont plus élevés parmi les groupes socio-économiques les plus modestes, ceux-là même qui ont présenté la mortalité la plus importante par Covid-19. Et enfin, dernier parallèle entre CMV et SARS-CoV-2, les femmes sont moins sensibles à leurs méfaits que les hommes.
L’infection au CMV est également très influente sur le système immunitaire ; elle augmente de 30 à 40 % la représentation des lymphocytes cytotoxiques spécialisés T et NK dans la circulation périphérique, tout en diminuant la proportion de lymphocytes plus polyvalents dits "naïfs", c’est-à-dire ceux qui n’ont pas encore rencontré un antigène. Cependant, l'infection au CMV n’a pas les mêmes implications selon l’âge : elle semble stimuler la fonction immunitaire chez les populations jeunes, y compris la réponse à la vaccination, mais elle a un impact clairement négatif sur celle des personnes âgées.
Le CMV accapare la réponse immunitaire
Cette tendance de l’infection au CMV à devenir handicapante avec l’âge pourrait s’expliquer par une forme de spécialisation de l’immunité contre ce virus précisément, marquée par l’accumulation avec les années de cellules immunitaires spécifiques au CMV, au détriment de celles restant disponibles pour une spécialisation devant un danger viral tiers tel le SARS-CoV-2. C’est ce surinvestissement du système immunitaire vis-à-vis du seul CMV et le déficit concomitant en cellules immunitaires naïves qui limiteraient l’efficacité de la réponse une fois l’hôte confronté au coronavirus, ce phénomène étant d’autant plus marqué que le sujet est âgé. Le caractère adaptatif de la réponse immunitaire et sa magnitude face au coronavirus seraient donc faussés par une pré-infection au CMV, notamment au niveau de l’activité des macrophages et la propension à déclencher les fameux orages de cytokines chez les cas les plus sévères.
CMV, cardiopathies, diabète et Covid-19 : ça se tient !
L’épidémie de coronavirus a particulièrement touché les personnes sujettes à l’obésité, à une maladie cardio-vasculaire et au diabète. Des études aux États-Unis et au Royaume-Uni ont montré que les porteurs âgés du CMV encourent un risque double de mortalité lorsqu’ils sont confrontés à des troubles cardiovasculaires, et que les porteurs de tous âges ont un risque accru d’hypertension artérielle.
Les troubles métaboliques à l’origine de l’obésité et du diabète, en particulier le dérèglement du métabolisme du glucose, sont également bien connus pour favoriser les infections sévères et avoir des conséquences au niveau cardiovasculaire.
De plus, l’amplitude de la réponse des cellules T spécifiques au CMV est influencée par un dérèglement de la glycémie, notamment par le facteur particulier de la concentration en hémoglobine glyquée (HbA1c).
Même s’il n’est pas démontré que l’infection à CMV chez l’humain prédispose au diabète ou accentue les dommages aux tissus corporels causés par l’hyperglycémie, des recherches sur la souris indiquent que l’infection au CMV induit une augmentation de l’inflammation systémique et de l’hyperglycémie.
Quoi qu’il en soit, ces différentes observations vont dans le sens d’une interaction potentielle entre cytomégalovirus, troubles du métabolisme (de la glycémie en particulier) et SARS-CoV-2 dont les résultats seraient les complications qui ont conduit un si grand nombre de malades en réanimation.
Il est donc capital de continuer à accumuler les données tous azimuts (métabolisme, microbiote, virobiote…) sur les malades et de les analyser très précisément dans l’espoir de stratégies clinique et épidémiologique plus efficaces en cas de nouvelle confrontation avec un tel épisode viral.
Source :
« The ancient and the new : is there an interaction between cytomegalovirus ans SARS-CoV-2 infection ? », dans Immunity & Aging, mai 2020. doi: 10.1186/s12979-020-00185-x
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