Accueil Polémiques En consultation : mesdames, rajoutez-en pour être prises au sérieux !
En consultation : mesdames, rajoutez-en pour être prises au sérieux !
Ces dernières années, de nombreuses études ont indiqué que lors d’une consultation, la douleur des femmes était perçue comme moins importante que celle des patients de sexe masculin, ce qui entraîne des inégalités dans les traitements proposés. Une équipe de chercheurs de l’université de Miami a tenu à vérifier cette hypothèse, et leur constat va malheureusement à nouveau dans ce sens.
Depuis quelques années, des chercheurs s’intéressant aux disparités femmes-hommes dans le domaine de la santé ont constaté que lorsqu’elles se plaignent de douleurs, les femmes reçoivent moins de médicaments anti douleur que les hommes et attendent plus longtemps pour les recevoir. Autrement dit : leur douleur est sous-estimée. Il en va de même pour les personnes aux origines méditerranéennes, arabes ou noires soupçonnées d’être moins résistantes à la douleur ou d’exagérer leurs symptômes en raison de stéréotypes racistes (ce que l’on appelle le « syndrome méditerranéen », une notion encore largement en circulation dans le milieu médical).
Des hommes « stoïques » et des femmes « expressives »
Pour analyser précisément le phénomène, des chercheurs américains ont demandé à cinquante soignants de visionner des vidéos d’hommes et de femmes exprimant une douleur à l’épaule (réelle) lors d’un exercice. Ces vidéos de patients ont été préalablement analysées par un logiciel d’expression faciale, pour s'assurer qu’il n’y ait pas de différence femmes-hommes entre le degré d’expression faciale et la douleur réellement ressentie. Les patients étaient donc classés selon le degré de douleur qu’ils ressentaient réellement et exprimaient par leur expression faciale. À la suite du visionnage, les soignants étaient invités à évaluer la douleur de leurs patients sur une échelle allant de 0 à 100, et à indiquer le traitement qu’ils prescriraient.
Alors que leur expression faciale illustrant leur douleur était égale à celle des hommes, les femmes ont été perçues comme ressentant moins cette douleur. Sur l’échelle de 0 à 100, la douleur féminine était en moyenne sous-estimée de près de 2,5 points, et celle des hommes était souvent surestimée d’environ 1,5 point. Un biais sexiste qui s’explique « en partie » selon les chercheurs par des stéréotypes, à savoir : penser que les femmes sont plus « expressives » que les hommes, voire « trop » expressives, et déconsidérer leur douleur. Pour Elizabeth Losin, professeure adjointe de psychologie au laboratoire de neurosciences de l'université de Miami et co-autrice de l’étude : « Le revers de ce stéréotype est que les hommes sont perçus comme stoïques, ainsi quand un homme arbore une expression faciale de douleur intense, vous pensez : « Oh là là, il doit être en train de mourir ! ». »
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Les « hystériques », le retour
Plus gênant, l’étude montre que ces stéréotypes menaient à des choix de traitements différents, tendant notamment à favoriser chez la femme la prise en charge psychologique à la prise en charge directe de la douleur par médicament. Autrement dit : les stéréotypes ont la vie dure, chez la femme, la douleur est bien plus souvent mise sur le compte du psychologique ou du psychosomatique que chez l’homme chez qui elle est bien mieux prise au sérieux et traitée. Enfin, information intéressante, que le prescripteur soit lui-même un homme ou une femme ne changeait rien à l’affaire : durant cette étude, les stéréotypes ont affecté les deux sexes de manière égale, et l’ensemble des soignants minimisaient la douleur des femmes.
Pour celles qui préféreront en rire qu’en pleurer, on peut alors se poser la question : les femmes devraient-elles en rajouter et jouer la comédie en consultation afin d’être prises au sérieux ?
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Sources :
« Gender Biases in Estimation of Others’ Pain », The Journal of Pain, mars 2021.
« Womens' pain not taken as seriously as mens' pain », Scien Daily, avril 2021.
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