Accueil Actualités L’académie américaine de nutrition et de diététique dénoncée comme une « voix pro-industrie »
L’académie américaine de nutrition et de diététique dénoncée comme une « voix pro-industrie »
Selon une étude parue récemment, la prestigieuse Académie de nutrition et de diététique américaine (AND) a accepté des millions de dollars provenant de multinationales des secteurs pharmaceutique et agroalimentaire, dont elle est devenue le véritable porte-voix.
La revue Public Health Nutrition, publiée par l’Université de Cambridge, s’est récemment intéressée à la « mainmise » des multinationales du secteur alimentaire ou pharmaceutique sur la profession de nutritionniste aux États-Unis. Pour cela, des chercheurs ont analysé le cas de l'Academy of Nutrition and Dietetics (AND), l'une des plus importantes associations de professionnels de santé étasunienne.
Le résultat est accablant. En compilant des données publiques et internes à cette académie couvrant la période de 2014 à 2020, on remarque que l’AND a accepté des millions de dollars de multinationales pharmaceutiques ou agroalimentaires comme Nestlé ou PepsiCo, Coca Cola, Unilever ou encore Kellogg’s, et a tranquillement « discuté de politiques internes » avec elles pour « répondre à leurs besoins », notamment via des prises de position publiques les favorisant. À tel point que les relations entre l’AND et ces multinationales sont qualifiées de « symbiotiques ».
Cerise sur le gâteau, certains des principaux dirigeants de l’AND occupent eux-mêmes des postes clefs dans ces industries et l'AND a carrément investi des fonds dans ces sociétés en en devenant actionnaire.
Des incidences négatives sur la santé publique dans le monde
Bien qu’elle ait « modifié certaines de ses politiques internes pour gérer l’ingérence et le financement des entreprises », l’AND continue de « faire avancer les intérêts des entreprises de plusieurs manières et sert de voix à ses sponsors ». Comme le synthétisent les chercheurs : « ces entreprises aident l'AND avec des contributions financières [puis] l’AND agit comme une voix pro-industrie dans certains lieux politiques, et opte pour des positions publiques qui entrent en conflit avec sa mission d'améliorer la santé à l'échelle mondiale » ce qui, au final, « pourrait avoir une incidence négative sur l'agenda de la santé publique aux États-Unis et dans le monde. »
Cet exemple, particulièrement frappant, n’est pas sans rappeler certaines pratiques que l’on peut également constater en France, non seulement auprès de grandes instances visant à définir des recommandations, mais également auprès d’associations de patients qui s’acoquinent avec l’industrie au point d’en devenir des fers de lance.
Les auteurs de cette étude rappellent d’ailleurs que le cas de l’AND présente des « similitudes frappantes » avec d'autres cas d'institutions « capturées par des entreprises », et que ces liaisons dangereuses ne sont généralement régulées (comme ça a été le cas pour les médecins et l’industrie pharmaceutique) que par le biais de lois ou de règles fermement imposées, lois qui n’existent pas encore aux États-Unis, pour régir les relations entre diététiciens, nutritionnistes et industriels.
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Références bibliographiques
« The corporate capture of the nutrition profession in the USA: the case of the Academy of Nutrition and Dietetics », PHN, Public Health Nutrition, 24 octobre 2022.
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