Le grand désordre hormonal (Corinne Lalo)

La polémique sur les perturbateurs endocriniens affole les discussions. Mais ce que rappelle Corinne Lalo, c’est que, pour académique qu’il soit, le mot « endocrinien » n’aide ni à prendre conscience de la globalité du problème ni à permettre une compréhension immédiate. La globalité du problème ? Elle en dresse une liste succincte : des poissons qui se féminisent, des crapauds qui deviennent hermaphrodites, des testicules des garçons qui ne descendent plus, la testostérone des hommes en berne, la puberté précoce des petites filles, les règles douloureuses des jeunes filles, l’endométriose et les ovaires polykystiques des jeunes femmes, les cancers du sein et de la prostate qui explosent… Corinne Lalo préfère parler de « perturbateurs hormonaux ». Et pour assurer une compréhension immédiate, elle rappelle le rôle des hormones : en assurant l’homéostasie de notre organisme, elles maintiennent tout simplement l’unité des conditions de la vie. Taux de sucre et insuline ; température et hormone thyroïdienne ; équilibre phosphore calcium et hormone parathyroïde ; reproduction et testostérone, progestérone ; équilibre veille-sommeil et mélatonine ; réparation des tissus endommagés et cortisol, adrénaline, noradrénaline ; respiration et pression sanguine, angiotensine II. On subodore déjà qu’un grain de sable suffirait à enrayer la belle mécanique. En fait de grain de sable, Lalo nous rappelle que depuis la sortie de la Seconde Guerre mondiale, l’industrie chimique a déversé dans l’environnement plus de 150 000 substances chimiques capables d’imiter nos hormones. Des pesticides de l’après-guerre (DDT, TBT) au bisphénol, phtalate, parabènes, téflon et autres tréclosan de notre quotidien, on peut vraiment s’interroger comme l’invite Corinne Lalo sur le fantasme d’un humain augmenté alors que notre environnement ne fait que le diminuer.