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Bien-être, mais pas pour tous
Promettre le bonheur par le travail sur soi, promouvoir des techniques et outils pour devenir "la meilleure version de soi-même ", c’est bien. Mais inclure dans ce projet les plus fragiles d'entre nous, et sortir de l'injonction permanente à la performance, c’est mieux. De récents ouvrages comme Politiser le bien-être ou Yoga Révolution nous incitent à creuser les questions qu’ils soulèvent par le prisme du yoga.
"Nous vivons dans une société qui croit que pour être un bon humain, il faut être heureux et en bonne santé", soulignait dans un documentaire (1) diffusé sur la chaîne Arte en 2021 Carl Cederström, sociologue et coauteur de Syndrome du bien-être (2). Et d'ajouter : "cette société ne se contente pas de privilégier ceux qui y parviennent, elle dénigre aussi ceux qui n’y parviennent pas."
Qu’il s’agisse du monde de l’entreprise, du développement personnel ou de la sphère du bien-être, l’économie néolibérale s’est insinuée dans tous les interstices de nos vies. Dans l’entreprise, la mondialisation de l’économie libérale s’est accompagnée de la modification des méthodes traditionnelles de management pour y intégrer des notions issues du champ du bien-être. Ceci dans le but de fortifier le psychisme des employés et d’amener les gens à être plus productifs en les rendant soi-disant plus heureux.
La philosophe, conférencière et autrice Julia de Funès (3) voit un grand paradoxe entre le fait que l’on ne se soit jamais autant préoccupé du bien-être des salariés et le fait qu’il n’y ait jamais eu autant de mal-être corrélé à des arrêts maladie longue durée.
Et le psychiatre Christophe André de résumer : " Si je n’arrive pas à être heureux, ça fait un échec de plus dans ma vie." Autrement dit, il n’y a aucune raison de se plaindre. Il suffit de se relever les manches et de faire quelque chose d’extraordinaire. Le néolibéralisme veut ça.
Nous sommes un marché
Le néolibéralisme est un capitalisme dont la spécificité est qu’il transforme tout en marché. Tout est un objet de consommation potentiel. Tout est une opportunité professionnelle potentielle. "Je trouve que l’exemple le plus flagrant est celui des relations amoureuses", raconte Camille Teste, professeure de yoga, autrice (4) et militante féministe. "Nous n’aurions jamais pensé que les relations amoureuses puissent devenir un marché potentiel. " À voir la quantité d’applications de rencontres disponible, il faut bien admettre que si. " Pour le bien-être, c’est exactement pareil. Avant, pratiquer une activité physique, faire une balade, prendre soin de soi ou même avoir certaines pratiques spirituelles – ou qui rentrent à mon sens dans les pratiques de bien-être –, existaient en dehors du marché. " Aujourd’hui, ce sont des biens de consommation comme d’autres : on peut s’offrir une cérémonie du cacao contre un certain nombre d’euros. Il y a eu un switch culturel à travers lequel nous nous sommes aperçus que tout pouvait devenir un marché, y compris nous-même.
Il faudrait sans cesse s’auto-optimiser
Dans certains espaces de bien-être, on retrouve cette idéologie néolibérale. Elle peut se traduire par des façons de parler, des croyances. " Je pense notamment à l’idée qu’il faudrait sans cesse travailler sur soi, s’auto-optimiser, poursuivre cette fameuse quête de la meilleure version de soi-même pour être heureux ", dépeint Camille Teste. Il y a cette croyance que si l’on élève ses ...
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