Accueil Entretiens "Le malheur inutile", Dr Alain Gérard
"Le malheur inutile", Dr Alain Gérard
Quand un psychiatre renommé et expérimenté en arrive à se demander s’il est avisé de prescrire un traitement à des patients en souffrance qu’il juge sains, c’est que quelque chose ne tourne pas rond. Le Dr Alain Gérard qui a d’abord modifié sa pratique sans être capable de bien analyser ce changement, est arrivé à la conclusion suivante : aujourd’hui, en tant que praticien, il s’agit davantage d’aider des individus sains à s’adapter à une société malade…
Comment est née l’idée de votre dernier livre* ?
J’avais le sentiment que trop souvent des patients échappaient aux deux types d’outils – basés sur la psychothérapie et le traitement biologique – que je leur proposais. Le contenu des entretiens se modifiait et la part de souffrance qu’ils exprimaient était toujours plus attribuable au monde extérieur. Bien entendu, on parle depuis des années du modèle biopsychosocial. Mais là, j’ai vraiment eu la sensation que ça allait en croissant. Cela me mettait mal à l’aise parce que certains types de prescriptions que je faisais habituellement sans état d’âme me posaient question. Cela a été une forme de remise en question personnelle. J’ai essayé dans un premier temps de formuler ce malaise par écrit pour m’aider moi-même et ensuite pour mieux prendre en charge mes patients. Je n’ai pas voulu écrire un livre de médecine ou de psychiatrie mais un texte destiné à tout un chacun, à travers le vécu de cinq personnes. La jeune infirmière dont je raconte le vécu n’était pas du tout dans la plainte. Elle allait bien jusque-là et était ravie du métier qu’elle exerçait. C’est une pratique particulière de son métier qui a fait que, petit à petit, elle a perdu tout plaisir à le faire.
Qu’appelez-vous " malheur inutile " ?
Dans mon métier, certaines souffrances, comme les psychoses, schizophrénie, démences dégénératives, etc., sont absolument inévitables. En revanche, les cas que je relate dans mon livre sont soumis à des conditions de vie qui pourraient être modifiées. Il est donc inutile de provoquer le malheur chez ces gens-là. Cela les dessert eux et ceux qui les obligent à travailler dans un environnement malsain. Je pense que, même pour une société très tournée vers l’argent, la manière de gérer les vies est mauvaise. Il y a un coût caché à ce malheur. Quand l’entreprise est malsaine, le taux d’absentéisme ou de maladies professionnelles augmente et la productivité diminue. Les salariés se désengagent. Le personnel tourne en permanence. Cette façon de presser les gens est non seulement immorale, mais improductive. Cela ne sert vraiment à rien, c’est inutile.
Que retenir des " cinq histoires de liberté retrouvée " racontées dans votre ouvrage ?
Je me suis rendu compte que ma fonction n’était pas seulement de permettre à mes patients de se réadapter à des conditions intenables. Il s’agissait plutôt, une fois ce stade obtenu, de réfléchir au sens de leur existence, de leur faire retrouver une confiance en eux en leur offrant de ne plus être épouvantablement déprimés ou anxieux. Même dans des périodes socialement difficiles, ils peuvent croire en eux, prendre conscience que la vie telle qu’ils la mènent est une espèce d’aliénation. Ils ne sont pas prisonniers d’un destin. Ils ont toujours une part de liberté, une marge de manœuvre. Quoi qu’on en pense, des alternatives existent.
Il fallait ensuite se servir de ce mieux obtenu dans les premiers temps du traitement pour aller au-delà et ...
Cet article est réservé à nos abonnés. Vous êtes abonnés ? Connectez-vous
Pourquoi cet article est réservé aux abonnés ?
Depuis maintenant près de 30 ans, Alternative Santé promeut les bienfaits des médecines douces ou des approches complémentaires.
Alors qu'elle sont attaquées de toute part avec la plus grande virulence, notre missions est plus que jamais essentielle pour défendre une autre vision de la santé.
C'est pourquoi nous avons besoin de vous pour nous soutenir dans nos actions d'information. En effet, si nous souhaitons garder notre indépendance éditoriale, seul votre soutien financier peut nous permettre de continuer notre mission :
- celle de dénoncer les scandales et dérives inquiétantes dans le monde de la santé, de mettre en lumière les effets indésirables
- celle de faire connaitre les solutions préventives et les remèdes naturels efficaces au plus grand nombre
- celle de défendre le droit des malades, des usagers de santé et des médecins à choisir librement les meilleurs remèdes.
Comme vous le savez certainement, nous ne mettons aucune publicité dans notre journal et restons libres de toute pression. Nous souhaitons garder toute notre indépendance, mais cette liberté a un coût.
La meilleure façon de nous aider et de soutenir une presse indépendante est donc de vous abonner à notre journal !
Je m'abonneRéférences bibliographiques
En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Alternative Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé
Santé mentale : La grande délaissée
Prévenir le burn-out en renforçant son organisme
La méditation contre le burn-out
La phytothérapie contre le surmenage