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Se mettre aux protéines végétales : mode d’emploi
Réduire sa consommation de viande n’est pas toujours simple dès lors qu’il s’agit d’apporter à son organisme les protéines dont il a besoin. Pourtant, il existe quantité d’alternatives, encore faut-il les connaître et savoir les mettre en œuvre.
Protéines : ni trop, ni trop peu
Les recommandations officielles préconisent de consommer des protéines à hauteur de 10 à 15 % de l’apport énergétique total chaque jour. En naturopathie, il est conseillé de couvrir ces besoins par l'équivalent d’environ 1 gramme par kilo corporel et par jour pour les enfants, les adolescents, les femmes enceintes et les personnes âgées. Les femmes allaitantes peuvent augmenter à 1,4 g et les sportif.ve.s de haut niveau, jusqu’à 1,6 g par kilo corporel. Le calcul est à adapter en fonction des besoins, la moyenne étant d’environ 0,9 g.
Des carences en protéines entraînent des conséquences tant visibles (fonte musculaire) qu’invisibles (fatigue chronique, déséquilibre hormonaux...). En excès en revanche, l’acide urique, issu de la dégradation des protéines animales, devient difficile à filtrer par les reins. Un taux élevé (hyperuricémie) peut générer inflammation (goutte) ou problème rénal (calculs).
Le commun des mortels ne passant pas son temps à peser ses aliments, une règle facile à retenir est la suivante : il est préférable de se limiter à un aliment riche en protéines par repas, afin de prévenir une acidose et, plus grave, certaines pathologies au niveau intestinal (colon). La précaution est d’autant plus de mise lorsque sont associées, au cours d’un même repas, protéine animale et protéine végétale (saucisse-lentilles). voire double protéine animale (viande et laitage par exemple).
Vers moins de protéines animales
Une tendance au flexitarisme ou semi-végétarisme fait de plus en plus d’adeptes. Elle consiste à réduire sa consommation de viande, et de protéines animales en général, et à augmenter la part de protéines végétales dans son alimentation. Les raisons sont plurielles, souvent combinées. Sur le plan sanitaire, une alimentation riche en protéines animales, donc en graisses saturées, a des effets délétères, notamment sur le système cardiovasculaire. Hormis l’excès d’acide urique évoqué précédemment, une consommation régulière ou excessive de protéines peut conduire à une acidification de l’organisme ou à un risque de dysbiose intestinale.
Au niveau économique, le prix diffère significativement entre une portion de viande de bonne qualité et celui d’une autre de légumineuses, même issues de l’agriculture biologique. Pourtant, même si ces dernières ont toujours été bon marché et de bonne qualité nutritionnelle, elles souffrent encore d’une image un peu triste.
Somme toute, la raison pour laquelle de plus en plus de mangeurs basculent vers le flexitarisme ou le végétarisme est surtout environnementale. De plus en plus nombreux sont celles et ceux qui prennent conscience de la non-durabilité de notre système alimentaire. Il est, en effet, avéré aujourd’hui que la production de protéines animales n’est plus soutenable en termes de consommation de ressources naturelles, tant son impact est grand (émission de gaz à effet de serre, pollution des eaux, déforestation, altération de la biodiversité, etc.).
Le problème de l'acide phytique
Les céréales complètes et les légumineuses, principales alternatives aux protéines animales, souffrent d’un désagrément : les phytates qu’elles contiennent. Ces composés sont dits chélateurs, c’est-à-dire qu’ils empêchent l’absorption des minéraux contenus dans les grains. Néanmoins, un temps de trempage minimal ou la germination suffisent à grandement en réduire la teneur. Il est recommandé de préférer les céréales complètes ou semi-complètes aux raffinées, dont l’apport en minéraux restera toujours plus élevé dans le premier cas que dans le second. En effet, les apports micronutritionnels (minéraux et fibres), l'effet de satiété et le faible impact sur la glycémie des céréales entières, ou semi complètes, sont incontestables.
La plupart des légumineuses et certaines céréales requièrent un temps de trempage pour perdre en phytates et gagner en digestibilité, allant de quelques heures (céréales) à une nuit entière (légumineuses). Ajouter aux eaux de trempage et de cuisson une cuillère à soupe de bicarbonate alimentaire pour en optimiser l’efficience.
Pour la germination , la technique est la même pour les graines, les céréales et les légumineuses.
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Des acides aminés au complet, ou pas
Le quinoa, l’amarante, les oléagineux, les graines sèches et germées, le soja ou encore la spiruline (qui contient 70 % de protéines, mais attention à la qualité du produit) comptent la totalité des acides aminés essentiels.
Arrêtons-nous un instant sur le soja. La transition vers le végétarisme passe souvent par une consommation plus importante, quelquefois excessive, de produits à base de soja (protéines, boissons, steaks végétaux, desserts, etc.). S’il présente des vertus nutritionnelles, le soja a aussi des effets œstrogéniques, dus à sa teneur élevée en isoflavones, appelées aussi phyto-œstrogènes. Ces composés actifs sont des perturbateurs endocriniens naturellement présents dans le soja. Aussi, attention, le soja tend à diminuer le taux de testostérone chez les hommes et à augmenter celui d’œstrogène chez les femmes. Sa consommation ne serait donc pas recommandée pour certaines personnes (enfants, personnes âgées et atteintes ou ayant été atteintes de cancers hormono-dépendants ou d’hypothyroïdie notamment).
Pour les autres, la modération est de mise et le soja fermenté (tofu, miso, tamari) plus intéressant : la fermentation, en pré-dégradant le soja, tend à réduire sa teneur en isoflavones. Il est indiqué, en outre, de bien lire les étiquettes alimentaires des produits industriels à base de soja, souvent composés de nombreux marqueurs d’ultra-transformation.
De ce point de vue, l’industrie agroalimentaire use de plus en plus de céréales ou de légumineuses sous forme d’isolats (pois, soja), d’amidon ou de sirop (blé, maïs), afin de recombiner leurs produits. Le processus de cracking, requis pour parvenir du grain entier au grain décomposé, en détruisant sa matrice, lui fait perdre tous ses intérêts nutritionnels. Il s’avère, en outre, que la surutilisation de ce type de composés est en passe de conduire à un nombre d’allergies croissant.
Pourquoi associer céréales et légumineuses ?
Hormis le soja, les légumineuses, ainsi que les céréales ont, chacune, un facteur limitant, c’est-à-dire qu’elles sont chacune déficientes en l’un des acides aminés essentiels. Les premières sont pauvres en méthionine, ou en sont même dépourvues, et les secondes, en lysine. La solution est de les associer, au cours d’un même repas ou de manière différée dans la journée.
L’association de céréales et de légumineuses est ancienne, et les exemples nombreux dans la plupart des cultures culinaires traditionnelles :
- riz et soja en Chine
- riz et lentilles en Inde
- pain et mogettes en Vendée
- semoule de blé dur et pois chiches en Afrique du Nord
- sorgho et niébé en Afrique de l’Ouest,
- maïs et haricots rouges en Amérique du Sud.
Soyez créatifs
Il existe une très grande diversité de céréales et de légumineuses : lentilles (brunes, vertes, du Puy, corail), pois cassés et pois chiches, haricots (blancs, flageolets, marbrés ou borlotti, pinto, noirs, azuki, cannellini, beurre, cornille, Lima, rouges, mungo, brun égyptien), fèves, graines de soja, riz (complet, rouge en Camargue et à Madagascar, jaune en Iran, violet au Laos, sauvage, arborio, glutineux, brun, basmati, thaï), blé, petit et grand épeautre, avoine, orge, seigle, sarrasin et kasha, millet ou mil, boulgour, semoule de blé dur, fonio, sorgho, teff, khorasan ou kamut, freekeh, maïs, quinoa, amarante, etc.
Chacune sa couleur, ses saveurs et ses apports nutritionnels : protéines, fibres, minéraux (manganèse, magnésium, fer, zinc, phosphore, potassium, sélénium, acide folique, etc.), vitamines (groupe B, C, E, K) et antioxydants. Notons que les oléagineux ou fruits à coque (amandes, arachides, pistaches, noix, etc.) et les graines (courge, tournesol, lin, chanvre, pavot, sésame, chia, acacia) sont aussi riches en protéines et micronutriments, en plus de disposer d’une belle teneur en acides gras monoinsaturés et polyinsaturés.
Comment préparer céréales et légumineuses ?
Il existe autant de variétés que de manière de les préparer. Les petites céréales (quinoa, millet, boulgour, sarrasin, etc.) seront d’abord chauffées brièvement à sec et à feu doux. Le volume d’eau bouillante et salée (sauf pour le quinoa qui, sinon, éclaterait) recommandé viendra recouvrir les grains. La cuisson sera douce, à couvert et sans être remuée. Un temps de gonflage d’environ cinq minutes est utile.
Les grandes céréales complètes (riz, blé, épeautre, orge, etc.) auront été trempées au moins deux heures avant la cuisson. Deux volumes d’eau pour un volume de céréales (mesuré avant trempage, à sec) démarreront à froid, dans une eau légèrement salée et, le cas échéant, agrémentée (bouillon, herbes aromatiques). Une fois l’ébullition atteinte, baisser le feu au minimum et laisser couvert, sans remuer. Le temps de cuisson varie selon les indications, mais le parfum qui se répand dans la cuisine est souvent de bon conseil.
Les légumineuses (lentilles, haricots, pois cassés, etc.) auront trempé toute la nuit ou un minimum de quatre heures, exception faite pour les pois cassés (une heure suffit) et les lentilles corail (trempage non requis). Couvertes d’eau froide non salée mais agrémentée, les graines cuiront tout doucement après ébullition, légèrement découvertes, jusqu’à avoir une consistance fondante, voire crémeuse. N’attendez pas trop, sinon pour les pois cassés destinés à être dégustés en purée, les céréales et les légumineuses trop cuites pourraient perdre en consistance et devenir hyperglycémiantes.
Un assaisonnement à la fois simple et savoureux pourra être un filet d’huile végétale (sésame, olive ou noix par exemple) de bonne qualité. Plus complexe, leur accommodement est un immense champ des possibles en termes de saveurs, de couleurs et d’arômes : du lait de coco aux épices variées en passant par des herbes aromatiques ciselées, des légumes émincés, des oléagineux concassés, des fruits frais ou secs grossièrement hachés, etc. La créativité est infinie, toutefois, préférez garder vos céréales et légumineuses entières grâce à une cuisson al dente : vous en préserverez ainsi la matrice et tout l’intérêt nutritionnel.
Invitons-les à notre table !
Les protéines sont indispensables et le sont plus encore à certains moments de la vie : au cours de la croissance, de la grossesse, de la vieillesse. Si les protéines végétales sont, à bien des niveaux, plus intéressantes, elles n’excluent pas celles qui sont issues du monde animal, notamment pour les personnes âgées dont la digestion des fibres insolubles peut être moins aisée. Pour cela, le flexitarisme offre une réelle souplesse : alterner, au gré de ses envies et des occasions, la part de végétal et d’animal. Les protéines végétales sont aussi vertueuses que variées et bon marché. Les légumineuses, en particulier, offrent des protéines de qualité et une forte densité énergétique, ainsi qu’un faible coût de revient, et une capacité de fixation symbiotique de l’azote ; autrement dit, un intérêt à la fois nutritionnel et écologique. Elles pourraient, de fait, être la clé de la transition alimentaire du 21e siècle.
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