Accueil Polémiques Les mystères de la longévité des Amish : au-delà de l'ADN
Les mystères de la longévité des Amish : au-delà de l'ADN
Vous avez certainement vu passer cette information, relayée dans beaucoup de médias. On a découvert chez les populations des Amish une mutation génétique spécifique, qui expliquerait leur longévité : 85 ans, soit en moyenne dix ans de plus que la moyenne des Américains. Les Amish sont ces petites communautés religieuses vivant dans des fermes isolées aux États-Unis. Très consanguins du fait de leur repli sur eux-mêmes, ils utilisent des chevaux pour l’agriculture ou leurs déplacements.
Or il se trouve que plusieurs centaines de ces Amish, qui descendent tous d’un même couple émigré de Suisse il y a six générations, ont d’après des recherches récentes une mutation sur un de leur gène (Serpine1). C’est pour cette raison, pense-t-on, qu'ils ils seraient moins exposés aux maladies cardiovasculaires et au diabète et vivraient plus longtemps. Autre fait notable : ils auraient en moyenne des télomères plus longs, ces structures qui protègent l’extrémité de nos chromosomes, maintiennent leur stabilité et raccourcissent avec l’avancée en âge.
Bien sûr, « l’exception amish » a de quoi intriguer : taux de cancer presque deux fois inférieur au nôtre, bien moindre prévalence d’autisme... Bien sûr, dans cette découverte se cache peut-être un mécanisme qui pourrait prolonger notre longévité à tous. Mais je ne peux pas m’empêcher de m’interroger sur l’emballement médiatique que cette découverte suscite...
Se pourrait-il que cet empressement à trouver LA CAUSE de leur insolente longévité, et à y trouver une forme de jubilation, dise quelque chose de nous ? Qu’il y ait une forme de soulagement chez nous, à trouver chez eux, une cause génétique claire et identifiable à leur longue vie ? Ne serait-ce pas un procédé commode pour nous exonérer ou nous déculpabiliser de nos modes de vie occidentaux et des innombrables pathologies qu’ils entraînent ?
"Oui, bien sûr, les Amish font beaucoup d’activité physique, limitent l’usage de l’alcool et des cigarettes, vivent à l’écart des villes et de la pollution… mais s’ils vivent plus longtemps c’est parce qu’ils ont un avantage génétique que nous n’avons pas !"
Il s’était passé la même chose ou presque il y a quelques années avec les centenaires d’Okinawa dont on voulait à tout prix «percer le secret». Après avoir élevé le fameux «régime Okinawa» au rang d'explication principale de leur longévité, on avait ensuite désigné un autre responsable, lui encore plus simple. Si les habitants d'Okinawa vivaient centenaires c’était en fait, plus probablement, du fait d’une plante utilisée couramment dans leur alimentation : le getto. Cette plante, devenue en l'espace d'une semaine la coqueluche des médias, est très riche en resvératrol, cet antioxydant présent aussi dans le raisin et « à l’origine du paradoxe français » (on mange gras et on boit du vin, mais on a une bonne longévité !). Et s’il est sûr que cet antioxydant a un impact sur la régulation de nombre de nos gènes, sur le cancer, le diabète, etc., il ne peut pas à lui seul évidemment expliquer notre longévité hexagonale. Et puis on avait réalisé que les habitants d'Okinawa avaient, également, des relations sociales très denses qui jouaient également sur leur longevité. Bref, tout ça est beaucoup plus compliqué qu’il n’y paraît et les explications ne sont jamais monocausales.
Comme avez pu le découvrir dans ce dossier dédié à la médecine anti-âge, le vieillissement est tout autant lié à nos niveaux hormonaux, au système immunitaire, à la glycation, au stress oxydatif, à la densité de nos relations sociales... Et si la préservation de la longueur de nos télomères peut certes être liée à une mutation génétique (comme dans le cas des Amish), elle dépend également d’apports suffisants en vitamines (B9, B3, C, E, D3), de l’exercice physique, des expériences dans la petite enfance, comme l'explique fort bien le prix Nobel de médecine Dr Elizabeth Blackburn.
La génétique n'explique pas tout, loin s'en faut, et elle est elle-même modifiée par nos modes de vies comme le montre chaque jour d'avantage le champ en plein expansion des recherches en épigénétique. Si vous voulez comprendre comment la nutrition modifie l’expression de nos gènes, préserve ou altère l'intégrité de notre ADN, ou bien si vous vous interrogez sur l’utilité des nouveaux tests génétiques pour prédire vos maladies futures, je vous invite à lire cet article sur la nutrigénomique.
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