Accueil Conseils santé Aliments fermentés : des bactéries domestiquées depuis 10000 ans
Aliments fermentés : des bactéries domestiquées depuis 10000 ans
Les aliments fermentés sont sans doute les plus vieux alliés de la santé humaine. En complément de la passionante interview de Marie-Claire Frédéric sur le sujet, nous évoquons ici les différents superaliments et compléments alimentaires dont les vertus santé sont directement liées au processus de fermentation. Moût de pain, pollen, papaye fermentée, grenade fermentée, germe de blé fermenté, Regulatpro®, Bio-Strath... petit tour d'horizon de ce que la fermentation peut faire pour nous.
Processus naturel de décomposition de la matière organique, la fermentation n'a pas besoin de l'homme pour se produire. Aussi n'a-t-elle pas été inventée mais découverte. Des traces vieilles de 8 000 ans avant notre ère attestent de son usage en Mésopotamie et en Égypte, bien avant que Pasteur, à la fin du XIXe siècle, n'aperçoive les premiers micro-organismes dans son microscope.
Longtemps motivée par le souci de conserver la nourriture, la fermentation constitue aujourd'hui une alternative intéressante pour entretenir sa santé et lutter contre certaines pathologies lourdes. Les bactéries sont partout, on le sait : dans l'air, sur notre corps, dans notre corps et à la surface des aliments. Par exemple, les levures servant à vinifier se trouvent sur la peau des grains de raisin, celles du levain naturel sont déjà sur le grain de blé. La fermentation exige toutefois des conditions bien particulières.
Loi de sélection naturelle
Pour fermenter, l'aliment doit être placé en anaérobie, c'est-à-dire en absence d'oxygène. L'oxygène est vecteur de bactéries. Lorsqu'il n'y a pas d'oxygène, elles sont stressées et luttent pour leur survie. Prises au piège, elles pompent dans le réservoir vital qu'elles ont à disposition. En se nourrissant des sucres de leur aliment hôte, les bactéries vont ainsi gagner en énergie et se multiplier. On appelle « probiotiques » la cohorte de micro-organismes qui se développent à ce moment-là. Au passage, les bactéries rejettent de l'alcool ou de l'acide lactique, des substances très acides destinées à tuer les agents pathogènes qui pourraient germer durant la décomposition.
Autrement dit, durant ce processus de putréfaction de la matière, la compétition entre les bactéries va s'orienter en faveur des bonnes. Les substances produites s'accompagnent d'un pic de vitamines, de minéraux et d’oligo-éléments. En colonisant l'aliment, les micro-organismes modifient sa texture, son goût et son potentiel nutritionnel. Il devient également plus facile à conserver dans le temps. La fermentation a d'ailleurs sauvé l'humanité de nombreuses famines et épidémies. Pour de plus en plus de gens, elle représente désormais un moyen de conjuguer santé, lutte contre le gaspillage et autonomie alimentaire.
Une usine à enzymes
On ne le sait pas toujours, mais de nombreux aliments de notre alimentation courante sont fermentés. D'ailleurs, tous le sont potentiellement : légumes, viandes, poissons, produits laitiers ou céréales. La fermentation lactique est causée par des bactéries et produit de l'acide lactique. C'est le cas des yaourts, des fromages, de la choucroute, du saucisson, des harengs ou encore des anchois. Le bleu et le roquefort, eux, naissent de moisissures, de même que le soja, fermenté en Asie depuis des millénaires. Comme la spécialiste nous l'explique en détail ici Marie-Claire Frederic, divers types de fermentations existent. La fermentation alcoolique, à la base de toutes les boissons alcoolisées, agit à partir de levures, des micro-organismes plus gros, de la famille des champignons. La fermentation acétique suit la précédente et transforme le vin en vinaigre.
Le kéfir, boisson légèrement gazeuse originaire du Caucase, peut être alcoolique (kéfir de fruit) ou lactique (kéfir de lait). Le kombucha, quant à lui, est fait à partir de fermentation de thé sucré dans une association de bactéries et levuresLes trois quarts des cellules immunitaires se trouvent dans l'intestin, organe essentiel de notre immunité. Plus le système digestif et la qualité du microbiote d'une personne sont faibles, plus la fermentation des aliments devient nécessaire. La fermentation lactique augmente la digestibilité des aliments et restaure la flore intestinale. Elle libère des enzymes dont la fonction est de découper les grosses molécules en molécules plus petites, plus faciles à traiter par l’organisme. Les aliments sont pré-digérés, évitant un travail lourd au système digestif, notamment au pancréas.
Les aliments fermentés sont donc particulièrement intéressants pour les personnes qui ont des problèmes de transit ou les intestins sensibles. Ils nous rendent aussi service quand nous vieillissons : on sait que la digestion, passé un certain âge, devient plus lente et moins efficace en raison d’une chute de production d’acide chlorhydrique dans l’estomac. Les aliments fermentés permettent de prévenir la constipation et sont aussi d’excellents antiseptiques contre les parasites intestinaux. La fermentation augmente la biodiversité des minéraux comme le manganèse, le calcium et le potassium et, contrairement aux idées reçues, n'acidifie pas l'organisme.
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Un exemple de produit naturellement fermenté : le pollen frais.
Celui-ci s'oppose au pollen sec, le plus couramment commercialisé. Malheureusement, la dessiccation réduit le volume des ferments lactiques et fait perdre au produit ses propriétés. Le pollen frais, placé rapidement en congélation (certaines marques s'en étant fait une spécialité) est ainsi beaucoup plus intéressant sur le plan nutritionnel. On parle alors de pollen lacto-fermenté ou « lacto-fermentant » dans la mesure où la congélation maintient actif le potentiel vivant du produit. En cure saisonnière, les bactéries lactiques du pollen frais renforcent le système immunitaire.
Des études ont également prouvé son action dans la prévention de l'hypertrophie et le cancer de la prostate. Pour cette problématique de prostate, préférer le pollen frais de ciste et de saule.
Ferments à boire, la nature brevetée
Un courant de pensée en santé naturelle, porté par nos précurseurs voisins allemands et suisses a vu l'arrivée, voilà déjà plus d'un demi-siècle, de compléments alimentaires buvables, fermentés. Encore discrets en France, ces recettes, qui se veulent simples, cachent des procédés de fabrication complexes. Petit tour d'horizon des spécialités dignes d'intérêt.
Bio-Strath Le Strath : des extraits végétaux fermentés
Bio-Strath est une boisson tonifiante à base d'extraits végétaux, choisis pour leurs vertus thérapeutiques (angélique, mélisse, sureau entre autres), et d'une levure (Saccharomyces cerevisiae, la même que la levure de bière). Elle est élaborée en Suisse depuis l'après-guerre et commercialisée par la marque du même nom. Les principes actifs des plantes sont métabolisés par les cellules de la levure, au cours d'un procédé de fabrication de deux mois. Les membranes cellulaires de la levure sont éclatées, permettant de faire pénétrer les composants végétaux et de les rendre assimilables par notre organisme. Un procédé nommé « plasmolyse » que notre corps ne saurait effectuer seul pour puiser ces bienfaits. Riche en vitamines, acides aminés et oligo-éléments, le Strath se prend en cure reminéralisante pour booster la vitalité, les compétences physiques et intellectuelles, ainsi qu'en complément à un traitement de chimiothérapie.
Regulatpro® : la "fermentation en cascade"
Le Regulatpro® est une boisson lacto-fermentée, mise au point et vendue par la marque suisse du Dr Niedermaier. Elle est issue de la mise en fermentation de légumes, de fruits et de noix d'après un principe de « fermentation en cascade ». Ce procédé, breveté, consiste à prélever une partie de la première fermentation, de la soumettre à un nouveau processus de fermentation et de renouveler l'expérience, ce qui permettrait d'en potentialiser les principes actifs. Les enzymes libérées contiennent des séquences d'acides aminés qui boostent les métabolismes fatigués, particulièrement assimilables. par les muqueuses en boisson énergisante.
Le moût de pain : un "pain buvable" aux vertus santé
Au début du XXe siècle, un boulanger allemand, Wilhelm Kanne, met au point un liquide nommé Brottrunk « pain buvable », composé de 50% de blé, 40% de seigle, 10% d'avoine, mélangés des lactobacilles acidophiles, des bactéries lactiques qui ont été isolées dans la microflore intestinale humaine et animale. Une fois cuit, le pain est mis dans d'énormes cuves où il est mélangé à de l'eau de source et placé en fermentation lactique lente durant 6 à 9 mois. Puis il est filtré, mis en bouteilles et soumis à un petit choc thermique pour le faire descendre en température afin qu'il conserve son potentiel nutritif. Très présent en Belgique et en Allemagne, un peu moins en France, le moût de pain est un réservoir de probiotiques et se prend tout au long de l'année pour entretenir son transit.
Fruits et céréales fermentés contre les maladies dégénératives
Pour lutter contre certaines pathologies lourdes (cancers et maladies neurodégénératives), certains laboratoires ont mis au point des traitements à base de fruits reconnus pour le pouvoir antioxydant, en repoussant les limites du processus de fermentation.
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Le jus de grenade fermenté
On connaissait le pouvoir antioxydant du thé vert, du vin rouge ou du chocolat noir, mais la grenade les bat à plate couture. Originaire de Perse, on raconte même que la pomme du jardin d’Éden était en réalité... une grenade. Ce fruit explosif, gros comme une balle de tennis, est une bombe antioxydante grâce à sa teneur en polyphénols 3 à 4 fois supérieure à celle du vin rouge et 75 à 80 fois supérieure à celle du thé vert. Contre les méfaits du stress oxydatif, responsable du vieillissement cellulaire à l’œuvre dans les tumeurs, les polyphénols agissent comme un anti-rouille.
Ils freinent le développement des vaisseaux sanguins qui alimentent les cellules cancéreuses et réduisent ainsi leur prolifération. Mais avant d'être assimilés par le sang et les cellules, les polyphénols doivent être dégradés par la flore intestinale. Or celle-ci est très variable d'un individu à l'autre. Entre surconsommation de sucre et de viande, les dysbioses sont fréquentes empêchant les substances actives d'être métabolisées correctement. Lorsqu'il est fermenté, le jus de grenade offre une biodisponibilité idéale. L'intérêt majeur de la fermentation est qu'elle augmente l'absorption et l'action des polyphénols. Durant la fermentation, les micro-organismes reproduisent la dégradation naturelle qui a lieu au cours de la digestion. Pour être résorbées correctement par notre intestin et pouvoir déployer leurs effets santé, les liaisons glycosidiques sont scindées. En outre, ces micro-organismes décomposent presque complètement le sucre du fruit, un plus pour les diabétiques.
L'Élixir de grenade, breveté par le laboratoire du Dr Jacob, est un des rares produits du marché à proposer un pur jus de grenade fermentée. Il n'est pas conçu comme un probiotique. Si son assimilation passe bien par l'intestin, son action est d'abord anti-inflammatoire contre les maladies neuro-dégénératives et anti-cancer. En préventif, il est aussi efficace en soutien au traitement du cancer de la prostate, des troubles érectiles et du cancer du sein. Sa protection antioxydante est de +9% en 1 semaine et +130% en un an.
L'extrait de papaye fermentée
« La papaye est l'arbre de la jeunesse éternelle », disait Vasco de Gama. En Amérique du Sud le « fruit des anges » entre dans de nombreux remèdes populaires. Aux Philippines, on a coutume de le manger presque pourri pour bien vieillir. Au Japon, il est comparé à un « cosmétique qui se mange ». Des études ont démontré la richesse nutritionnelle du fruit en fermentation. Le laboratoire Osato s'est imposé comme le fournisseur mondial d'extrait de papaye fermentée depuis qu'il a fourni l'élixir de jouvence au Pape Jean Paul II, atteint de la maladie de Parkinson.
L'extrait est obtenu par une fermentation alcoolique de 9 mois de pulpe de papaye après addition de dextrose et de Saccharomyces rouxii, une levure particulièrement sucrée. Le produit brut obtenu subit une dessiccation complète pour finalement donner une poudre blanche qui ne contient plus ni enzymes ni fibres, mais des glucides, des protéines, des vitamines (B6, B9 et niacine) et des minéraux (calcium, magnésium, potassium, fer, cuivre et zinc). Si elle n'a pas de valeur antioxydante en soi (pas de valeur ORAC), elle serait en revanche immunomodulante et capable de stimuler nos défenses antioxydantes. Multipliée par 5 par rapport à celle du jus frais, son action anti-radicalaire est 20 fois plus grande que celle de la vitamine E prise isolément. Cet antioxydant d'exception neutralise les radicaux libres et inhibe l'oxydation des lipides.
L'extrait de papaye fermentée, pour cette raison ralentit le vieillissement, diminue l'impact de la pollution environnementale et ralentit l'évolution des maladies dégénératives. Pourtant, il n'a pas les qualités d'un produit de fermentation. On ne trouve pas plus les grands principes actifs du fruit (comme la papaïne) dans l'extrait, que de probiotiques classiquement issus de la fermentation. *
Le germe de blé fermenté
Il s'agit de la partie anatomique distincte du grain et du son dont il est séparé, la plus petite mais la plus riche en nutriments. Durant le processus de fermentation, des molécules, les quinones sont libérées grâce à l'activité enzymatique de la levure Saccharomyces. On pourrait consommer une tonne de germe de blé, sans avaler un microgramme de ce que contient le germe de blé fermenté. Ces molécules nouvellement créées n'existent pas dans la nature, où seuls existent leurs précurseurs. La fermentation dure 18 heures, puis le produit est décanté, filtré et additionné d'eau. Le liquide est ensuite séché par pulvérisation à l'aide de maltodextrine de maïs (pour adoucir le goût, difficile à boire) et de dioxyde de silicium. Il en résulte une poudre, labellisée et standardisée, commercialisée en Europe sous le nom de Xaventin. La lyophilisation permet d'obtenir une poudre donc rendre le produit facilement consommable même si le fabricant aime à dire qu'il ne fait rien d'autre que reproduire ce que faisaient les Égyptiens. Il est utilisé comme adjuvant aux thérapies conventionnelles contre le cancer, comme le cancer du côlon. Le germe de blé empêche l'utilisation du glucose par les cellules tumorales pour se nourrir et se développer. Elles se divisent plus lentement et la maladie progresse moins vite. Le produit peut être prescrit (une quinzaine de médecins en France et en Belgique) mais n'est pas remboursé. On peut aussi l’acheter librement sur internet, mais il reste encore assez cher.
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